Bob Bovano

Bob Bovano
Guitariste
Pays principal concerné : Rubrique : Musique
Dominique

Bob Bovano est né à Port-au-Prince au 14ème jour du mois de mars de l'année 1952. Tout jeune déjà, il découvre une vocation d'artiste sans pouvoir en préciser les contours. Et s'il s'investit tout entier dans les arts plastiques comme premier champ d'expérimentation de ses pulsions créatrices, ce n'est pas par choix mais parce que c'était à l'époque la seule ouverture à sa portée. Peu importe. Il a alors 15 ans. L'âge de l'avidité en matière d'exploration des sens. Il s'y livre avec passion, s'appropriant goulûment des sensations renouvelées d'une renaissance permanente. "Tout commence depuis l'enfance", admet-il, "chaque artiste a son histoire secrète et sacrée et pourtant il est comme un livre ouvert". Paradoxe. Ambivalence. Lucidité précoce et revendiquée. Bob Bovano s'invente un itinéraire qu'il parcourt au gré de ses questionnements,l'oeil tour à tour rêveur et critique. Il rêve déjà de réinventer la juste mesure entre l'art et l'éthique. Pendant 3 ans, il explore l'univers des arts plastiques. La céramique, la sculture et la poterie. Puis, presque imperceptiblement tant c'est naturel, il se tourne vers la musique. C'est qu'elle l'habitait déjà, la musique. Musique qui berce l'enfance, courtise l'adolescence et habite l'artiste. Il commence d'abord par interpréter les chansons à la mode, les mélodies qui marquent toute une époque. Les émotions qu'elles suscitent en lui, il veut les partager avec les autres. Son alter ego. D'abord comme spectateur attentif puis comme troubadour. La scène l'attire déjà. Ce besoin viscéral de faire face aux autres, de leur communiquer ses pulsions et ses réflexions, il n'y résiste pas. La guitare en bandoulière et la tête bouillonnante de rêves, il part à la conquête de la scène. C'est le début d'une carrière artistique au débuts un peu dents de scie, car il faut bien poursuivre les études alors que tout en lui converge vers le libre cours d'un besoin irrésistible d'exploration de la musique.

La quête incessante
D'une sérénade à l'autre, il trouve le temps de se faire acteur de théâtre, de goûter le plaisir, entres autres, de la répartie théatrale avec Jean Marie Gabriel et de travailler sur la mise en scène des "Noces de sang" de Frédérico Garcia Lorca avec Rassoul Labuchin. Le fait d'avoir su faire vivre ces quelques personnages dont on a dit, non sans raison, qu'ils sont le passage entre l'éphémère et l'infini, aura pronfondément influencé sa carrière artistique. Il vivra intensément, dorénavant, cet anticonformisme qui guette tous ceux qui ont su s'ouvrir à la misère du monde. Quelques années auparavant, pourtant, en juillet 74 pour être plus précis, il s'était affirmé comme auteur compositeur et chanteur, allant même jusqu'à intégrer pendant plus de 5 ans un groupe musical à la mode. Il effectue alors de grandes tournées à travers le pays avec le groupe Coumbite Créole, goûtant la joie de faire danser la foule, puis, après avoir vécu certaines de ces expériences aui, au niveau des rapports humains ne font pas honneur au monde artistique, il met abruptement fin à cette période de sa carrière. Il fera depuis lors cavalier seul, cherchant sa voie, se frayant un chemin parmi les diverses tendances musicales, affinant son propre style, marquant ses propres rythmes. Amplifiant son cri de révolte.
Du côté des exploités
Lui qui avait pris un malin plaisir à dévoiler "les moeurs cachées de la bourgeoisie", était devenu de plus en plus attentif au monde qui l'entoure, à ses inégalités, ses injustices, ses secrets espoirs. Le ton se fait alors plus grave, le regard passe de l'indignation à la colère et se fait accusateur. Il avait enfin trouvé sa voie. Il était devenu le chantre de la récolte contre le système, le rebelle musicien, le provocateur. Comme pour conjurer le mauvais sort et sans doute sans se faire d'illusion, il décide de participer à certains travaux de développement rural. C'est l'époque où le concept même de développement est remis en question et fortement critiqué dans les milieux de la résistance. Lui sait ce qu'il cherche. Une rencontre déterminante, un problème non résolu, la réponse à certaines questions, le besoin de repères, la localisation de défis. Il peut aussi en toute quiétude rechercher ses racines. Il entend surtout sourdre la révolte paysanne, suit cette lente remontée de sève, en identifie les étapes. L'expérience d'animation du développement rural à la Vallée de Jacmel dans la localité de Tuff, avec le Centre de Recherche et de Développement rural (CRD), semble tenir une bonne place dans ses souvenirs. "Il y eut d'autres moments forts au cours de cette expérience, tient à souligner Bob Bovano, comme par exemple, mes expérience d'animateur et de formateur en radio rural (radio morn) et surtout la création à Jacmel de l'association culturelle " Lumière, force, organisation" (LFAGO). Une section de cette association devait être inaugurée l'année suivante en France à Paris, Place des Fêtes, dans le 20ème arrondissement. Cette fin des années 80 est également celle de l'exploration du monde artisanal et l'engagement de l'artiste dans des activités de promotion de l'artisanat haï tien en France et dans quelques départements d'outre-mer comme la Guadeloupe et la Martinique.
Le chanteur du temps présent
Bob Bovano est le chanteur des grandes causes.En 1984, il se retrouve en Jamaïque où il se donne pour tâche de présenter la langue et la culture-de résistance-créoles à des écoliers jamaïcains. Le coup d'état militaire de 1991 en haïti le rappel à la lutte pour un retour à une politiquede démocratie. Il doit souvent entrer dans la clandestinité. C'est l'année de la résistance face à l'oppression, qui trouve écho dans le texte de ses chansons. L'année 92, celle du 500ème anniversaire de la fameuse"rencontre des deux mondes", il se retrouve à l'avant-garde du mouvement citoyen de dénonciation du génocide des indigènes et du rejet de l'entreprise de perpétuation du système d'exploitation de l'homme par l'homme dans les Amériques. Sa composition "Génocide 1492", qu'il chante avec conviction, est non seulement le fruit de sa rencontre avec la musique-racine qu'il veut sans frontières, mais aussi celle de la reconnaissance de son talent par le jury du concours de chant "Découverte 92" organisé par Radio France Internationale(RFI). Ce succès lui ouvre le chemins de France, il s'y produit en solo et avec la troupe Ouanga Nègès dans les festivals à Saint-Nazaire, Nantes, Brest, dénonçant partout les vices du système. Officiellement invité en 1994 par la municipalité française de Lorient, il inaugure ce qu'il qualifie de "conférence musicale", une façon de souligner l'autre fonction sociale des artistes dans un monde de plus en plus exclusif. 1995. Les méfaits de l'ajustement structurel et de la dette externe dans les pays en développement mettent en lumière le rôle joué par le Fond Monétaire Internationale dans le processus de paupérisation des pays du sud (FMI -"Nou pa dwe" avec la Plate-forme Haïtienne de Plaidoyer pour un Développement Alternatif (PAPDA). Là encore, il laisse éclater sa rage conter le système, chante la résistance des peuples face à l'agression planifiée et participe à de nombreuses manifestations contre le néolibéralisme. Ce qui lui laisse quand même le temps de dénoncer sans relâche la répression politique et l'agression économique qui frappent les plus démunis de la société haïtienne. 1995, c'est aussi l'année où il reçoit le 2ème prix du concours organisé par le Comité National pour la célébration du 50ème anniversaire des Nation Unies. Celle aussi de ses périples à Santa Domingo et à Cuba avec le Centro Cultural Domininco-Haïtiano (CCDH). "Mon engagement dans la musique populaire a évolué vers ce que j'appelle la musique participative, acquis générés par les expériences vécues avec les sambas dans le cadre des revendications paysannes. Dans mes tours de chant, la participation de mes interlocuteurs est un acte naturel et prioritaire qui s'exprime à travers une musique consciente de sa fonction et un usage promotionnel de la langue créole" Artiste invité à "La fête de la musique" organisé en juin 1993 par l'Institut français d'Haïti, il assiste aux manoeuvres d'intimidation de la police répressive qui provoque l'avortement d'un spectacle qui se serait certainement transformé en concerts de protestation et de désaveu total au régime. Bob Bovano veut partager le fruit de ses réflexions, il écrit des articles dans le quotidien Le Nouvelliste et l'hebdomadaire Haïti Progrès qui publient en juillet 93 son texte assez remarqué sur "Le mouvement racine face à la conjoncture de facto". "La musique est un cri d'amour fraternel qui se dégage dans le sens d'une pratique culturelle populaire, écrit-il en ajoutant qu'un peuple sans musique est une nation sans volonté et sans identité qui n'est viable que si elle s'appuie sur l'identité des hommes pour lesquel elle est construite". Le Bob Bovano des années 2002 est unartiste qui a mûri tout en conservant son caractère espiègle, son goût pour la provocation, son rejet du néolibéralisme. Sa rencontre récente avec le peuple dominicain, son intérêt sur la décentralisation (la Fondation Bayahonda), ses activités de solidarité avec des groupes dominicains de base dont le Movimiento Mujer Dominico-Haïtiana (MUDHA) pour le droit à l'éducation des Dominicains d'origine haïtienne font de cette nouvelle expérience un gage pour l'avenir des rapports entre les deux populations de l'île. Son engagement socio-politique reste intact mais sa capacité de trouver d'autres canaux d'expression culturelle évolue de jour en jour. Actuellement, il expérimente une production style techno, ce qui confirme sa vocation d'artiste citoyen d'un monde sans frontières qui revendique son identité haïtienne et qui considére avoir le droit de rester où il veut, le temps qu'il faut, comme dans cette nouvelle chanson qui décrit sa vie d'étranger rasta dans la ville de Santa Domingo et sa décision sereine mais sans appel: "en la ciudad me quedo". Bob Bovano s'ouvre aujourd'hui au monde. Avec de nouvelles chansons et un regard encore plus pénetrant sur le village global.

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