Mohamed Ali Allalou

  • Mohamed Ali Allalou
Musicologue, Dj (disc jokey), Comédien(ne)
(Homme)
Pays principal concerné : Rubrique : Musique, Cinéma/tv, Littérature / édition

Mohamed Ali Allalou est un comédien, journaliste et animateur de radio et de télévision algérien, né le 30 mars 1954 à Saint Eugène (actuellement Bologhine), un quartier d'Alger. Membre fondateur de la Bled Connexion (association d'artistes algériens), il est l'auteur de nombreuxouvrages et de plusieurs manifestations culturelles et citoyennes en Algérie et en France.

BIOGRAPHIE

«Je suis né le 30 mars 1954 à Saint Eugène, mais en fait j'ai décidé de renaître à Kenadsa le 31 septembre 1979. Pourquoi ? Parce que j'ai été atteint d'une tuberculose pulmonaire à l'Institut de technologie agricole de Mostaganem où je poursuivais mes études. Je pensais que j'allais mourir, et c'est le professeur Chaulet, à qui je suis extrêmement reconnaissant, qui m'a sauvé. Il m'avait conseillé d'aller habiter dans un endroit sec. Et comme j'avais mon oncle Lounès qui résidait dans cette belle contrée du sud-uest algérien, je n'ai pas hésité un instant. Je l'ai contacté et il m'a accueilli chez lui où j'ai séjourné pendant une année, le temps de ma convalescence.»

Une famille modeste

«Ce qui m'a impressionné à Kenadsa, au-delà de la beauté du paysage, c'est qu'il y avait au moins un instrument de musique dans presque chaque demeure. C'est, je pense, ce qui a inspiré quelques années plus tard le personnage de cheikh M'hamed que j'ai campé dans mes émissions.» Mohamed vécut à Saint Eugène, mais comme son père était recherché par la police pendant la guerre, sa famille trouva refuge à Climat de France. «Des images d'enfance furtives surgissent dans ma tête comme ces tirailleurs sénégalais qui tiraient en direction du groupe Taine, un ensemble d'immeubles ou encore les youyous et le bruit des casseroles qui fusaient des maisons où le slogan Algérie algérienne revenait sans cesse, repris en chœur par la population. On habitait dans un espace réduit qui faisait office de salon d'essayage de la boutique de tailleur que tenait mon père. C'était l'extrême promiscuité, mais ne dit-on pas que l'étroitesse est dans les cœurs.»

Ce n'était pas le paradis mais pas encore la misère… Mohamed Ali raconte avec un humour non dissimulé la posture de son père moudjahid qui, au-lendemain de l'indépendance, se résigna à attendre que le nidham lui affecte un appartement qui ne viendra jamais. «Il a fallu que ma mère investisse sans en référer à personne un deux pièces à Bab El Oued.» C'est là que Mohamed Ali passa son enfance, connut son ami de toujours Youcef Redjimi, artiste polyvaillant et polyvalent qui l'accompagnera plus tard dans la fameuse émission «Sans pitié», qui fera fureur en mettant face-à-face un prof d'arabe rigide, conservateur et intolérant, et un autre décontracté usant d'un langage moins châtié et compris de tous. Mohamed Ali fera ses classes à l'école Léon Roche et au lycée Okba de Bab El Oued jusqu'en terminale. «J'avais raté mon bac et ma tante, grâce à ses connaissances, m'a fait redoubler au lycée El Mokrani où j'ai connu la Hight Society. Les belles filles, les belles tenues et les beaux parfums, un autre monde pour moi.»

Puis vint le service national à Aïn Turk, que Mohamed passa sans encombre dès lors qu'il n'eut pas trop à se dépenser : «La plage, la drague et le soir j'étais DJ. C'est là que j'ai touché à l'animation. J'étais payé en liquide ! Et noté vin sur vin !» Pendant cette période, Mohamed Ali s'est mis à l'écriture et consignait ses réflexions qu'il a soumises un jour à son oncle, journaliste de renom, Mokdad Halim, spécialiste des reportages avec l'espoir de l'intégrer dans le métier. «Mais il a décelé en moi une autre vocation, celle d'animateur radio. Il m'a introduit auprès du directeur général de la radio de l'époque, Rachid Boumediène, qui m'avait bien reçu en me mettant à l'essai.

Tout est parti de là.  On m'avait demandé, ce qui relevait du défi, d'aller interviewer l'écrivain et poète Abderrahmane Lounas qui ne recevait personne – j'ai réussi ce pari. Ma première émission ''Contact'' avec Aziz Smati date de 1980.» Les émissions se caractérisaient par la fraîcheur, l'insolence à travers un arabe parlé courant et non l'arabe châtié somnifère que peu d'auditeurs comprenaient. Même le français n'était pas accessible à la majorité. «Les contraintes du terrain ont voulu qu'on parle normalement, ce langage est rentré à la radio, on avait cassé un tabou et on pouvait rire de l'humour du terroir si vrai, si spontané.

Ça, ce n'est que le terrain qui peut vous les offrir !» Et puis les thèmes choisis puisaient directement dans le quotidien des auditeurs. «Avec mon nagra (magnétophone), je faisais les rues d'Alger. En voyant une femme enceinte, dans l'attente interminable d'un taxi, je la vois mal à l'aise. Elle invoque l'absence de toilettes publiques à Alger et la difficulté pour une femme de se soulager. Ce thème, a priori inabordable, a été traité. Mais le drame, c'est que rien n'a changé ; allez trouver en 2014 des WC publics à Alger !» Allalou a aussi tâté le cinéma, domaine qu'il ne connaissait pas.

Un jour, en1994, Chouikh, réalisateur, est venu le voir pour jouer dans Youcef dont voici le synopsis : gravement blessé à la tête, Youcef a été interné dans un asile psychiatrique à la fin de la guerre d'Algérie. Pour lui, le temps s'est arrêté en 1960, et il se croit toujours prisonnier de l'armée française. Il finit par s'évader et après une longue traversée du désert découvre, terrifié, l'Algérie contemporaine. Ses frères du FLN ont sombré dans la corruption ou dans l'intégrisme religieux.

Les colons français sont partis depuis longtemps, ayant laissé la place à un gouvernement plus insidieux encore. Youcef va dès lors se mettre en tête de faire sa propre révolution. «J'ai lu le scénario et ça m'a plu d'emblée. Ce qui est extraordinaire, c'est un peu l'histoire de Boudiaf. Le film était mal tombé en plein terrorisme. Pour exemple, au cinéma Plaza de Bab El Oued, il n'y avait que 3 ou 4 spectateurs ! Ce film n'a pas eu de vie et c'est dommage ! C'était quand même une expérience», résume Mohamed Ali qui se satisfait du succès de l'émission télé concoctée avec Aziz Smati Rokroky.

Une vocation est née

Invité au festival du film de Berlin en1994, Mohamed Ali apprend qu'on avait tiré sur son ami Aziz à Chéraga. «Je me rappelle, c'était le 14 février, journée des amoureux. On pensait qu'il était mort, on m'avait conseillé de ne pas rentrer à Alger, c'est comme ça que j'ai rejoint directement Paris où j'ai vécu dans un appartement sur l'île Saint Louis. C'est là qu'on se rencontrait. Il y avait Dilem, Mme Doudoune, Khalida Toumi, Rachid Taha. Dans cet appart, parfois on pleurait, parfois on se racontait des blagues. On se donnait la main pour ne pas se sentir seuls. Et parfois même des youyous fusaient de cet endroit. Peut-être pour la première fois dans ce quartier cossu et paisible. Bref, on avait créé une île algérienne dans l'île !»

Clandestin pendant deux ans, Allalou a exercé à Radio Nova qui lui a permis d'obtenir ses papiers. «C'est une chaîne super branchée. Ce qui m'intéressait, c'était de parler de l'Algérie ! Mais ce n'était pas évident. Comme l'éditorial ne m'intéressait pas, j'ai trouvé une autre radio appelée Radio Maghreb qui, visiblement, n'était là que pour encaisser les subventions de l'Etat. Mais grâce à la radio, j'ai appris à connaître la situation dramatique de certains de nos ressortissants qui vivent amèrement le décalage avec leur progéniture.» A Radio Orient, Allalou dénoncera le racisme ordinaire qui prévaut dans cette chaîne où les propriétaires libanais regardent de très haut de manière méprisante leurs employés, surtout algériens.

Au Cabaret Sauvage, où il travaille toujours en tant qu'intermittent, Allalou y trouve une précaire stabilité après avoir bossé quatre années à Radio Soleil tenue par des Tunisiens, mais qui n'en menait pas large : «J'ai tenu parce que j'étais régulièrement payé.»



La radio, c'est la rue

C'est grâce à sa force de conviction que Allallou, qui a égrené tout au long de sa carrière un chapelet d'émissions «culte», voit sa carrière prendre de l'ampleur. Il ne s'est pas bercé d'illusions, sans jamais se résigner. Il eut même des coups de gueule comme lorsqu'en 1988, n'acceptant pas la censure qui lui a été imposée par la direction, il n'eut d'autre alternative que de claquer la porte. C'était quelques semaines avant les événements d'Octobre 1988 auxquels, tient-il à le préciser, il a participé à Bab El Oued. «Il s'agissait d'un reportage et d'une interview de Fellag. Entre la compromission et le départ, j'ai préféré partir.»

Mais quelques semaines plus tard, le même directeur lui propose de revenir. «J'ai accepté et c'est là que j'ai fait ''Sans pitié'', puis un vrai-faux journal avec ''Kamendja''. Enfin, un duo d'enfer avec Redjimi dans une satire très significative, parodiant la manière d'enseigner la langue arabe classique. Nous avons été chercher les mots arabes qui prêtent à confusion pour un débat fort intéressant avec les auditeurs. L'humour aidant, le succès a été total.» L'exil en France, comme tous les exils est douloureux.

Au cours d'une virée au bled, Allalou, en coordination avec notre confrère Mustapha Bendfodil, concocte «Alger Noormal» une plongée, plutôt un florilège de vies algéroises racontées avec tendresse et émotion par des artistes et des gens simples issus de milieux divers. Entre-temps, Alger mon amour, fresque musicale dont il a été le directeur artistique fait un tabac. «L'idée est venue lors d'une discussion avec Baâziz. Il fallait faire quelque chose de fort. L'argent collecté devait revenir à la fondation Belkhenchir. Le producteur, un gros requin, sort d'abord 5000 CD, à titre unique, puis sort l'album complet de Baâziz qui comprend la chanson en question. Le producteur s'est tapé tout le fric. C'est une véritable escroquerie !»


 

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