Une poignée de femmes berbères du Moyen-Atlas marocain, tisseuses de tapis à leurs heures de nuit, s'interrogent sur leurs savoirs, leurs traditions, leurs vies et leur devenir. Elles nourrissent en elles quantité de rêves dont elles laissent parfois entrevoir les lumières.
Mères, filles, grand-mères, toutes travaillent dur aux tâches domestiques comme à la fabrication de tapis traditionnels. Dans une économie autarcique, elles restent sans autonomie financière, ni reconnaissance de leur talent. Elles veulent farouchement s'arracher à leur condition et offrir étude et avenir à leurs enfants.
D'Essaouira, sur la côte atlantique, leur parviennent les nouvelles de femmes, semblables à elles, qui ont créé des coopératives de production d'huile d'Argan et changé leurs vies. Taaborth et Erkia partent en exploratrices et, éblouies, rapportent à leurs sœurs les images de ce premier voyage hors de leurs montagnes et un espoir.
Un film de Ithri Irhoudane
Maroc, 2015, Documentaire, 52'
NOTE D'INTENTION
"La vue porte loin sur les grands plateaux du Moyen Atlas. Elle se perd dans un océan de pierres où, de proche en proche, au creux des vagues minérales, roulent quelques écumes vertes. Je sais ces maisons pour y être née. Je sais quel froid les encercle neuf mois de l'année et quelle chaleur les habite. Je sais le chant des femmes. Ecoutez. Elles tissent. Leurs doigts courent sur le métier. Elles chantent. Les couleurs dansent à leurs ordres. Elles peignent des flamboiements sur l'ombre des mechtas, elles jettent des couleurs sur l'ocre sombre des murs. Je vais m'assoir auprès d'elles comme je le faisais étant enfant. Je fredonne avec elle des chansons pleines d'amour-passion, de larmes et de désirs. Comme hier et comme les enfants d'aujourd'hui, je regarde leurs visages à travers la trame du métier à tisser. Les lignes verticales des fils découpent l'ombre et la lumière. Mise en scène inconsciente, où nos âmes d'enfants cherchent et trouvent l'impulsion qui sublime l'instant. Aujourd'hui, j'ose leur poser les questions qui brûlaient mes lèvres de petite fille, quand rebelle, je cherchais comment briser tous les interdits sans renier mon pays berbère, sans partir, sans perdre mon droit à être là, assise à côté du métier à tisser, fredonnant avec mes sœurs, mes mères, mes filles, les chants de rêve des femmes berbères. Elles diront les rêves qui étaient les leurs : quel homme, quel sentiment, quel désir... Elles diront les grands départs qu'elles imaginaient. Les voyages qu'elles ont faits, immobiles. Elles diront le chant qu'elles voulaient écrire, les pierres qu'elles voulaient sculpter, les tapis libres et fous qu'elles voulaient tisser."
Ithri Irhoudane
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