On trouvera ci-après le point de vue d'Odile GOERG (que nous partageons entièrement) qui a été communiqué aux organisateurs du Festival International de Géographie 2011 de St Dié des Vosges (6-9 octobre 2011) :
Madame, Monsieur
Je ne suis pas géographe, mais je suis intéressée de manière évidente par le thème du FIG 2011 : l'Afrique. Je suis en effet historienne de l'Afrique contemporaine à l'université Paris Diderot-SEDET et donc sensible à toute manifestation concernant ce vaste continent. Les éditions l'Harmattan m'avaient d'ailleurs contactée à ce sujet et j'avais soumis une proposition de table-ronde avec des collègues géographes. C'est dire mon intérêt pour votre manifestation.
Les remarques que je souhaite faire ici découlent de mon point de vue d'historienne et concernent l'affiche qui illustre cette édition : trois femmes, de profil, de peau plus ou moins foncée, aux lèvres plus ou moins épaisses, regard dans le vague. Hormis le fait, étonnant, que le référent géographique ne ressort pas ou que la dimension sexy, voire gentiment érotisée des épaules dénudées, pose problème, je ne peux qu'être frappée par le parallèle entre cette affiche conçue en 2011 (par qui ?) et l'imagerie coloniale. D'une part, on se situe ici dans la reproduction mimétique du regard anthropométrique et anthropologique qui s'impose au XIXème siècle et se développe dans le contexte colonial, celle des types ethniques, féminins notamment, présentés hors situation concrète. Par ailleurs, cette iconographie est dans la lignée des représentations coloniales, comme en témoignent par exemple les affiches pour l'exposition coloniale internationale de 1931 qui mettaient en scène trois femmes, vêtues de couleurs vives, symbolisant l'Asie, le Maghreb et l'Afrique dite noire.
Je n'ose imaginer les rues de St Dié couvertes de cette vision de l'Afrique, tant elle ne fait que conforter les stéréotypes qui continuent à circuler en France, malgré le profond renouvellement des études par les géographes et les historiens de l'Afrique, dont témoignent bien plus l'expression d'"Afrique plurielle" et diverses illustrations de l'intérieur de la brochure. Dommage.
cordialement
Odile GOERG
professeure
Histoire de l'Afrique
Université Paris Diderot-Paris 7