Mohamed Belkheir est né sous la tente aux environs de 1835, dans la tribu des Rzeigat (El-Bayadh), au sud de l'Oranie. Il fut donc témoin de la lente et lourde infiltration coloniale menée par le Second Empire. Et ce poète bédouin, en meneur d'hommes, prend une part active à la deuxième insurrection des Ouled Sidi Cheikh (dans l'Oranie) en 1881. Adversaire indomptable et irréductible du colon français, il fut envoyé en forteresse à Calvi, en 1884, pour y rester plusieurs années. "Me voici entre mer et oubli", songe-t-il, sacrifiant à une mélancolie qui ne lui est pas coutumière. L'insurrection - provisoirement - réduite, Belkheir vivra une ultime amertume : tant de compagnons ont trahi la cause par veulerie ou opportunisme. Pour stigmatiser ceux-là, le poète décoche ses traits les plus acérés? Cette poésie polémique, elle non plus, n'a pas vieilli, elle est éternelle - elle est traversée d'images qui nous font parfois penser à Garcia Lorca - et préfigure les meilleurs vers d'un Mahmoud Darwich.
Neuf ans après son exil forcé, Mohamed Belkheir retournera au pays, où il mourra en 1905.